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APRES 10 ANS DE GUERRE CONTRE LA COALITION INTERNATIONALE, BASHAR FETE LA VICTOIRE

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Après dix ans d'un conflit sanglant en Syrie, le terrorisme islamiste y est de plus en plus circonscrit et Bachar el-Assad reste au pouvoir, au grand dam des puissances occidentales. Bruno Guigue et Rony Brauman livrent leur analyse pour RT France. Le chaos incarné. La Syrie, jadis rayonnante par son patrimoine culturel, est aujourd'hui un vaste champ de ruines et de désolation. Ce 15 mars marque les dix ans du déclenchement de la guerre civile syrienne, qui a transformé ce pays arabe à l'histoire millénaire en terrain de jeu macabre pour des terroristes islamistes des quatre coins du monde, mais aussi pour les puissances internationales.

Les puissances occidentales, Etats-Unis, Grande-Bretagne et France en tête, ainsi que la Turquie, l'Arabie saoudite ou le Qatar, ont longtemps prétendu lutter «à la fois contre les terroristes et contre Bachar el-Assad». Elles sont entrées dans l'arène syrienne sans prêter main-forte au gouvernement du pays dans sa lutte contre Daesh, générant ainsi une confusion totale qui rend complexe une lecture des alliances sur le terrain. Tandis que la population prise au piège continue de payer un lourd tribut, la guerre de Syrie a révélé (si cela était encore nécessaire) les contradictions des puissances occidentales et de leurs alliés du Golfe, qui, se targuant de défendre les droits de l'homme contre le pouvoir syrien, ont participé à entretenir le chaos des années durant. Pour revenir sur ces dix années de guerre, RT France a interrogé deux observateurs français de ce conflit aux points de vue divergents. Bruno Guigue, analyste politique et ancien haut fonctionnaire, et Rony Brauman, ancien président de Médecins sans frontières, s'entendent toutefois sur un point : les puissances occidentales auraient mieux fait de s'abstenir, que ce soit pour la paix en Syrie ou pour leurs propres intérêts. Un bilan impossible à évaluer avec précision S'il est sans aucun doute cataclysmique, le bilan de la guerre est difficile à établir de manière précise. La Banque Mondiale estimait en 2017 le nombre de morts entre 400 000 et 470 000 personnes en se basant sur les estimations de l'ONU (400 000 morts estimés en avril 2016) et le Syrian Center for Policy Research (470 000 morts estimés en février 2016). Ce chiffre, en 2021, doit sans conteste s'être considérablement alourdi. La population syrienne poussée à l'exil par la guerre est estimée par l'ONU à 5,6 millions d'habitants qui ont fui vers la Turquie, le Liban, la Jordanie et d'autres destinations. En interne, le nombre de déplacés s'élève à 6,6 millions de personnes et la moitié de la population, soit plus de 13 millions de Syriens, vivrait dans le besoin. En plus de la guerre, de l'effondrement total du tourisme, les sanctions économiques infligées à la Syrie par les Etats-Unis et l'Union européenne, comprenant notamment l'interdiction d'importer des produits américains et un embargo sur les produits pétroliers, ont un large impact sur la population syrienne. Elles constituent un quasi-blocus du pays, compte tenu des punitions que risquent les entités (pays ou entreprises) faisant du commerce ou de l'aide humanitaire vers la Syrie. Les répercussions des sanctions affectent également les secteurs médical et alimentaire. «Les sanctions américaines asphyxient l’économie. Les Syriens doivent faire des heures de queue pour acheter du pain. L’essence est presque introuvable, même si sous escorte russe en Méditerranée, des navires iraniens acheminent encore du pétrole», détaille ainsi le journaliste Georges Malbrunot dans le Figaro. Le «printemps syrien» ? La première manifestation d'une opposition syrienne au visage séduisant pour les observateurs occidentaux s'inscrit dans le cadre de ce que les grands médias ont rapidement baptisé «les printemps arabes». En janvier 2011, la «révolution du jasmin» en Tunisie faisait tomber Zine el-Abidine Ben Ali au pouvoir depuis 1987, et en février, Hosni Mobarak était lui aussi contraint à la démission en Egypte après 30 ans de règne sans partage, suite à des manifestations massives.

Le 15 mars, c'est au tour de l'opposition syrienne de sortir dans la rue, timidement d'abord. Elle reçoit immédiatement les «hourras» des observateurs occidentaux rêvant de voir tomber le «dictateur» Bachar el-Assad au pouvoir depuis l'an 2000. Mais la Syrie est plus partagée, les loyalistes sont nombreux et l'opposition peine à se structurer et à être incarnée par un mouvement politique identifiable. Pour Rony Brauman, cette mobilisation des premiers jours est «remarquable» car composée de gens «de toutes origines, de toutes classes sociales qui défilaient chaque semaine pour demander des libertés de base». De son point de vue, «ce sont les agressions qui ont été commises par les miliciens pro-gouvernementaux qui ont fait monter le niveau de violence et peu à peu les démocrates ont été remplacés par des combattants». Bruno Guigue dresse un constat différent. Selon lui, «le rôle de la médiasphère» dans la construction de l'opinion occidentale a joué un rôle non-négligeable. Le climat et «l'enthousiasme auquel nous avons tous certainement participé en faveur du renouveau que pourraient apporter ces printemps arabes» sont certainement pour quelque chose dans ce qui s'est produit en Syrie. A ce moment-là, de son point de vue, Assad est sur la liste «des potentats visés par ces printemps arabes et le fait que son pouvoir soit très contesté par une série d'opposants et la mouvance islamiste, brossait un tableau très négatif de la situation en Syrie». Mais pour Bruno Guigue, c'est là que «la manipulation a commencé». «On nous a montré des manifestations de barbus qui rassemblaient quelques milliers de personnes et qui ont été présentées comme un immense soulèvement populaire», se souvient-il. «En revanche, il y avait aussi des manifestations de juin à novembre 2011 favorables au gouvernement syrien et aux réformes qu'il proposait», et celles-ci ont été «occultées» par le storytelling occidental, assure-t-il. Ces images de rassemblements pro-Assad, on peut les revoir sur la chaîne YouTube de l'AFP depuis Damas et sur la chaîne d'Euronews, depuis Alep. Mais profitant de la rue et de l'air du temps, l'agitation ne va pas tarder à prendre une tournure violente. Comme le rappelle Georges Malbrunot, à la fin du mois de juillet 2011, avec «la création de l’Armée syrienne libre, composée d’officiers déserteurs, et la réplique du gouvernement syrien, la crise se mue en guerre». Un milliard de dollars par an de la CIA pour les «rebelles syriens» Dans son livre intitulé La guerre de l'ombre en Syrie, le journaliste indépendant Maxime Chaix décrit les dessous de l’opération secrète «Timber Sycamore», lancée en 2012 à l'initiative de la CIA, et à laquelle participèrent des services secrets occidentaux ainsi que leurs homologues des pays du Golfe comme l'Arabie saoudite.

Selon le New York Times, le programme autorisait initialement les forces américaines à former les «rebelles syriens» à l'utilisation d'équipements militaires, mais pas à fournir directement l'équipement proprement dit. Quelques mois après sa création, il a été modifié pour permettre à la CIA à la fois de former et d'équiper les forces «rebelles». Dotée d’un budget d'un milliard de dollars par an, cette opération consista à fournir des armes aux opposants à Bachar el-Assad, et particulièrement à des membres de la fameuse Armée syrienne libre (ASL). Toutefois, comme le rappelle une note de lecture du Monde diplomatique sur le livre de Maxime Chaix, «ces armes tombèrent rapidement aux mains de groupes parmi les plus radicaux, dont une branche d’Al-Qaida en Syrie, connue sous le nom de front Al-Nosra. Ces livraisons se sont poursuivies après août 2014, contribuant à alimenter par contrecoup l’organisation de l’Etat islamique [Daesh], alors combattue par une coalition internationale». «François Hollande a reconnu qu'il avait livré des armes à la rébellion syrienne malgré l'embargo décrété par l'UE», rappelle Bruno Guigue. «C'est l'époque où vous aviez tous les gauchistes de Saint-Germain-des-Prés qui expliquaient qu'il fallait livrer des armes lourdes à l'opposition», s'étrangle-t-il. Ce faisant, pour cet analyste, quand les occidentaux disent lutter contre Daesh, c'est «vrai et faux». Cette intervention a été «à géométrie variable puisque par exemple, quand la colonne infernale de Daesh venant d'Irak a pris Palmyre, pas une seule cartouche n'a été tirée à l'époque, alors que cette colonne blindée était aisément repérable par tous les moyens dont disposent les occidentaux». «Concrètement, ils combattent Daesh quand ça les arrange et ils laissent Daesh combattre l'Etat syrien quand ça les arrange», analyse cet ancien haut fonctionnaire. Une guerre d'influence internationale Sur les terrains politique et diplomatique, en 2012, plus de 100 pays reconnaissaient une «Coalition nationale des forces de la révolution et de l'opposition» comme unique représentant du peuple syrien. Mais en dépit des efforts occidentaux, l'opposition en exil et les «rebelles» en Syrie ne sont pas parvenus à former un front uni, et les factions armées se sont progressivement fragmentées. «L'émergence de Daesh et l'intervention armée de la coalition conduite par les Etats-Unis à partir de 2014 amorce une période encore plus sombre pour la Syrie», ajoute Georges Malbrunot.

A l'appel de Bachar el-Assad, la Russie apporte son soutien militaire à la Syrie à partir de 2015, entraînant le recul des djihadistes qui avaient afflué par milliers de plusieurs dizaines de pays étrangers, dont la France. Comme le mentionne le journaliste du Figaro, spécialiste du monde arabe, le conflit syrien s'internationalise en 2015, avec l'entrée en jeu de la Russie. «Moscou par son aviation, Téhéran grâce à ses miliciens irakiens, afghans ou libanais et la Turquie», vont désormais «imposer le tempo» de la guerre en Syrie. Mais c'est au moins une vingtaine de pays et des dizaines d'organisations, dont beaucoup terroristes, qui ont pris part à cette guerre et le territoire a été longtemps fragmenté sous diverses influences. Aujourd'hui, la plus grande partie du pays est à nouveau contrôlée par le pouvoir syrien appuyé par ses alliés que sont la Russie et l’Iran. Mais le nord-est du pays est encore dominé par les combattants kurdes, alliés des Etats-Unis. Quant à la Turquie, elle a désormais la mainmise sur la province d’Idleb au nord-ouest, aujourd'hui dernière poche du terrorisme avec, principalement, les combattants du Front Al-Nosra. Comme le souligne l'analyste politique Bruno Guigue, «l'intervention russe [contrairement à celle des puissances occidentales,] est légitime en droit international puisque faite dans le cadre de la charte de l'ONU qui prévoit qu'un Etat peut faire appel à un autre Etat pour faire face à une menace extérieure, en l'occurrence l'arrivée massive de mercenaires lobotomisés qui constituent encore aujourd'hui une menace extrêmement sérieuse». «Il m'apparaît plus qu'évident que la Russie est un acteur extrêmement important du règlement du conflit syrien, tout comme la Turquie ou l'Arabie saoudite», abonde pour sa part Rony Brauman, qui ne soutient toutefois pas l’intervention russe en Syrie et dénonce «le niveau de violence auquel a recouru le régime de Bachar el-Assad» qui le place, selon lui dans «la catégorie des grands régimes criminels, ultra-violents». Du point de vue de Bruno Guigue, les interventions occidentales sont à l'inverse de celle de la Russie, «de A à Z totalement illégitimes. Elles constituent des violations du droit international de manière caractérisée puisqu'aucun mandat onusien n'autorise lesdites puissances à intervenir sur un territoire qui n'est pas le leur et pour lequel elles n'ont pas été sollicitées par un Etat souverain».

 


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